2013 a très mal commencé mais s'achève dans la joie et la bonne humeur. La Tunisie a enfin pris le droit chemin. Tout le monde est beau, tout le monde est content. En effet, un premier ministre vierge vient d'être nommé à la tête du gouvernement, Nida Tounes se désagrège, les mauves se décomposent et les islamistes font leur révolution culturelle: Fini la doctrine wahhabite, qatarie, égyptienne ou turque. Zaballah compte désormais s'inspirer du modèle scandinave...
Commentaires sur Karl Zaballahfeld, présente sa collection...
- Bravo pour l'analyse de la situation en Tunisie. Toujours excellent et surprenant Z
- L'un de mes préférés et des plus justes après le Boson de higgs et le programme économique d'Ennahda. Tandis que les allemands exportent, que les singapouriens investissent, que les coréens innovent, que les suisses s'éduquent, que les neerlandais apprennent des langues, que les israéliens déposent des brevets et que tous avancent...nous recherchons abou iyadh. Trop de cons chez nous ? Pas plus qu'ailleurs. Il faudrait juste sérieusement commencer à se réveiller et avancer.
- Le vrai danger pour ce pays c'est l'ignorance et l'anti-intellectualisme de son élite. "Un islamisme ultra-libéral", on aura tout vu... http://bit.ly/JJYHAR
- Bonne année chère Athéna, quel plaisir de te revoir ici.
Sur ton point je ne peut que te contredire; l'extrême droite n'est par définition pas libérale - ni économiquement, ni évidemment sur les droits civils. Elle est plus souvent populiste, corporativiste et protectionniste/isolationniste - donc économiquement très loin de ce qu'on appelle le "libéralisme" économique et effectivement plus proche de la gauche. Elle se différentie des partis de gauche occidentales en étant plus nationaliste et quelque fois racistes.
Je pense que nous manquons grièvement de culture économique et politique, de la culture générale des idées et des -ismes et le terme "libéralisme" est utilisé à tort et à travers. La notion de "ultra-libérale" je ne la connais que comme insulte mais pas comme concepte. Personne ne prends la peine de définir ce qu'il veut dire par ce terme, mais Mme Mabrouk, en parlant d'"islamisme ultra-libéral" perd toute crédibilité à mes yeux Plus qu'un oxymore, c'est une ânerie intellectuelle; et j'ai peur pour la Tunisie quand l'opposition sur lequel on fonde notre espoir se compose de gens qui ne comprennent rien à l'économie, des conservateurs du genre "a7na mouch mta3 hadha", sont anti-sémites à peine camouflés et pan-arabistes jusqu'à défendre un Bashar...
Je veux revenir aussi un peu sur la notion de libéralisme, surtout vu un commentaire à ce sujet dans la caricature précédente: on peut considérer le système économique et ses fondements comme une autoroute sur lequel le flux des marchandises/capitaux/personnes sont les voitures. Tous les pays ont des systèmes d'autoroutes plus au moins semblambles avec un besoin de code de la route et une police pour assurer l'application. Après il y a des déclinaisons spécifiques; certains pays ont une limite de vitesse assez élevée; en moyenne les voitures arrivent à destination beaucoup plus vite et le flux est plus efficace. Par contre, quand il y a un accident, le risque de carambolage - d'arrêt cardiaque du système - est très élevé. D'autre ont des limites très basses et des visions de zéro morts. Le système est plus solide, mais on n'est pas sûr d'éviter les accidents non plus et quand il y a des morts on est surpris et pas vraiment prêt. Ce sont là des différences de nuances dans des systèmes très semblables. Le choix est souvent question de débats et il n'y a pas vraiment de "bonnes réponses". Ceci va pour les systèmes économiques des pays démocrates qui ont réussi à créer le maximum de richesse pour le citoyen median. En Tunisie par contre en est pas vraiment là; nous ne sommes pas à débattre les lois de l'autoroute, le taux d'alcolémie maximale acceptable ou autre nuance d'un système qui marche. En effet nous n'avons même pas d'autoroutes, pas le fondement nécessaire pour faire circuler les voitures. Les routes sont cassées, trouées à tel point que sans une grande 4x4 qui piétine tout le monde, c'est impossible de rouler. Alors, qu'on cesse de parler d'"ultra-libéralisme" en Tunisie; nous ne sommes même pas au point du Smig libéral nécessaire au bon fonctionnement de notre économie interne. Ou alors il faudrait redéfinir "libéralisme" en introduisant par exemple le concepte bien marxiste "d'homologation des prix", et discuter avec l'autre compère Kim Jong-un qui s'y connait aussi dans le traitement des sales profiteurs et spéculateurs, agents de la manipulation étrangère qui veulent destabiliser le pays...
Bises à tous
pour rebondir sur ce débat relatif à l'ultra libéralisme,je dirais que celui ci possède quand même une certaine consistance théorique et pas uniquement polémique,dans la mesure où toute une école de pensée économique (l'école de Chicago en l'occurrence) a développé la théorie du "moins d'Etat",donc d'un Etat réduit à ses fonctions régaliennes ( police,justice, défense nationale), impliquant une baisse drastique des dépenses publiques,la mise à mort de toute forme d'état-providence tel qu'il s"est développé depuis la grande crise de 1929 et la fin de la seconde guerre mondiale et in fine (et ce serait pour certains le but de l'opération) une baisse des impôts au profit des classes les plus riches.
en ce sens l'ultra libéralisme ne relève pas du fantasme mais de la "guerre des classes" dont les riches sont sortis victorieux car le "modèle de Chicago" appliqué à l'origine par Thatcher et Reagan a conquis le monde et entrainé un énorme accroissement des inégalités.(même et y compris dans des pays de tradition social démocrate).
la prétention des "ultra libéraux" de laisser aux forces spontanées du marché le soin de nous mener à " l'optimum économique" est donc une revanche des "rentiers capitalistes" sur Keynes et le keynésianisme interventionniste étatique des sociaux démocrates.
en ce sens aussi la pensée religieuse qui a une conception "charitable" de la résolution des problèmes sociaux est "ultra libérale compatible" et certainement pas favorable à des analyses en terme de lutte des classes.
quant à l'extrême droite elle a pu prendre des postures interventionnistes et même étatistes (donc anti libérales) mais sa fonction a toujours été historiquement d'écraser les mouvements ouvriers et les syndicats et d'assurer la survie de la bourgeoisie quand elle se sentait menacée, quitte à appliquer ensuite (comme au Chili de Pinochet ) les purges ultra libérales (le Chili a constitué de fait le "laboratoire" de l'école de Chicago et de ses célèbres "Chicago boys") purges entrainant une gigantesque "casse sociale"
L’entretien de Ghannouchi (voir le lien fournit ci-haut pas Z) est inquiétant. Il l’est d’autant plus que Monsieur se voulait surtout rassurant.
A le lire, l’islamisme politique, dont il s’est fait l’apôtre, n’est autre chose qu’une quête de justice, de liberté et de progrès humains, tels qu’on les voit dans les pays scandinaves. Les accusations d’archaïsme social et d’usage de la violence à des fins politiques, comme en témoignent ses appels à l’escalade sociale, aussi bien dans les années 80 qu’aujourd’hui, ne seraient que des procès d’intention, ou, en tout cas, un épiphénomène qu’il ne contrôle malheureusement pas entièrement, puisque son mouvement est démocratique et qu’il n’est qu’une voix parmi des milliers d’autres toutes aussi égales. De lui, donc, on aura eu tout faux. Sa vie, il l’aura consacré a un combat et un seul: faire la preuve qu’il n’y a pas de contradiction entre l’islam et ce monde de justice, de libertés et de progrès qu’est la Scandinavie, et importer le modèle scandinave dans nos contrées.
Ce qui m’inquiète, ça n’est pas tant la contradiction qui vient tout de suite après et qu’on pourra résumer ainsi: «Ceci dit, nous ne sommes pas le Danemark, et il y’a donc les constantes unanimement reconnues par les oulémas de la Oumma, qui priment et desquelles on ne peut pas dévier».
Non, ce qui m’inquiète, c’est cette détestable habitude des arabes à gaspiller l’énergie et l’effort. Car, si l’objectif est de vivre dans l’équivalent des sociétés scandinaves, pourquoi ne pas y aller par le chemin le plus direct et le plus court? Soit le chemin qu’ils ont emprunté eux-mêmes pour être là où ils sont. Pourquoi insister a y parvenir par des théories approximatives, ou, en tout cas, qui restent a démontrer scientifiquement, et, donc, par un chemin aléatoire dans le meilleur des cas??
Je me souviens d’une discussion dans laquelle Amilcar me rappelait, sur ce même espace, que l’expérience des pays scandinaves devait historiquement quelque chose au protestantisme. Et c’est historiquement vrai. Le protestantisme, qui est né de la contestation du pouvoir de l’Institut de l’Eglise, a été marqué par deux aspects centraux. Le premier aspect est ce qu’on pourrait appeler une culture du savoir, qui résulte de la reconnaissance du droit au savoir et à une lecture critique des Ecritures à tout chrétien, et non pas seulement aux hommes de l’Eglise. Ca n’est d’ailleurs pas un hasard si des temples du savoir, comme Harvard et Yale, furent établis par les premières colonies de puritains. Le second aspect est une culture, comment dire, sfaxienne. Soit une culture industrieuse, faite de frugalité et de discipline. Ici, non plus, ça n’est pas un hasard si la révolution industrielle y trouva son berceau.
Maintenant, mon propos n’est évidemment pas de suggérer au Cheikh de se convertir et, puisque le périphérique suit le principal, de nous convertir avec lui au protestantisme. Ceci pour la simple raison que, même si le protestantisme fut un terreau fertile, ce qui marquera effectivement l’évolution des scandinaves et leurs semblables est une étape supplémentaire. Un choix de société dont la pierre angulaire est la séparation entre les consciences, qui resteront individuelles, et la collectivité, qui s’occupe de gérer un vivre ensemble intelligent à qui chacun apporte sa pierre par le biais de l’impôt, et aura, en contrepartie, son mot à dire sur la gestion de l’ensemble. C’est ce qu’on appelle une communauté de citoyens égaux en devoirs et en droits dans un état civil qui en est l’émanation. Ce que je voudrais lui suggérer, donc, c’est d’arrêter de s’éparpiller dans des démonstrations hasardeuses pour essayer d’arriver à cette destination souhaitée, puisqu’il y’a déjà un chemin testé, qu’il a été emprunté, et qu’il y a mené.
Maintenant, je doute qu’un porteur du double titre de oustaath et Cheikh aie besoin de moi pour arriver à cette conclusion. Ce qui pose des questions sur la motivation profonde qui pousse notre Cheikh à poursuivre cette démonstration au prix du sang.
La réponse, je n’arrive pas à la trouver. Je ne sais pas si l’islamisme politique arrivera jamais à se concilier avec la démocratie. D’un côté, nous n’en avons pas eu le commencement de la preuve en quatorze siècles. Mais d’un autre côté, quatorze siècles à l’échelle du cosmos, c’est presque rien. Ce que je sais par contre, c’est que l’islamisme politique finira par faire la démonstration définitive de la théorie des cordes. Vous savez, cette idée géniale qui tente de concilier la mécanique quantique et la théorie générale de la relativité, et de nous offrir finalement l’explication définitive du pourquoi du comment du cosmos et de notre existence. Jugez-en: de toute son histoire, il n’a produit que des cordes. Des plus petites aux plus grandes. Des laisses pour cerveaux, jusqu’aux vraies lisses en chanvre pour les cous des libres penseurs. Je n’y avais pas pensé plutôt, mais ne serait-il pas merveilleux que la théorie des cordes soit vérifiée par l’idéologie de la potence?? Finalement, les arabes rentreront dans l’histoire par la grande porte.
En attendant, bonheur et amour en cette nouvelle année.
Bonne année 2014 à tous. Puissent les tunisiens régler rapidement leurs problèmes identitaires et religieux avant de se remettre au boulot.
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