Le retour de l'abondance !
A la suite de la vague d'arrestations de la semaine dernière (voir ici), l'économie semble soudain rebondir en Tunisie. Comme ne cessait de le marteler notre cher président, les pénuries sont bel et bien provoquées par les traitres, les comploteurs et les vendus. Saïed l'a d'ailleurs fait constater le lendemain même du coup de filet, en se réjouissant dans une réunion au ministère de l'intérieur, du retour à la normale des circuits de distribution des denrées alimentaires…
Le peuple applaudit le président et salue sa fièvre éradicatrice de la corruption. Peu importe que la culpabilité des traitres soit prononcée avant jugement, peu importe les méthodes musclées qu'emploie la police, peu importe la torture et l'humiliation, peu importe qu'on ratisse large et que les mailles du filet coincent en plus des requins, les thons, les sardines et les dauphins. Allah reconnaîtra les siens. Et puis on s'en fout car de vengeance le peuple a faim. Il a tellement faim qu'il applaudit aveuglément.
Pour assouvir cette faim, terroristes, islamistes, syndicalistes et mafieux ne suffisent plus. Zabaïed, notre sainte Chléka, resserre encore plus les mailles et pèche des journalistes. C'est savoureux un journaliste ! Le patron de mosaïque FM, Nouredine Boutar est toujours en détention car il serait lui aussi mêlé au grand complot qui vise à affamer le peuple (voir ici). Sont visés les journalistes de l'émission phare "Midi Show" animée par Elyes Gharbi. Emission qui compte des chroniqueurs aux langues bien déliées, tels que Haythem Mekki, Zied Krichen et Jihane Silini.
Mais comme le peuple est insatiable, Zabaïed passera après les journalistes aux artistes, aux intellectuels, et tout ce qui exprime une pensée contraire à la doctrine de la Sainte Chléka. Car bientôt la moindre critique suffira à prouver son implication dans le complot diabolique contre le gentil peuple tunisien.
Et quand on sera débarrassé de tout ce beau monde, il ne restera au peuple qu'à manger le peuple jusqu'à ce que demeure seul Saïed debout répétant devant Boukornine : le peuple veut, le peuple veut…