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DEBATunisie
7 août 2023

BDS et BDSM

"Migrants en Tunisie, désert funèbre" titre en Une, le journal français Libération dans son numéro du 2 Août 2023. Ce même journal qui en janvier 2011 avait mis en Une la photo d'une Tunisienne dans un bain de foule arborant fièrement "Ben Ali Dégage !". Elle paraît très lointaine cette époque. Cette magnifique photo de 2011 qui est devenue historique, a de forte chance de se trouver encadrée dans le salon de nombreux Tunisiens dits "progressistes", pour qui le journal Libération serait devenu aujourd'hui un organe néocolonialiste de désinformation et de propagande contre la Tunisie de Saïed. Et puis de quoi se mêlent-ils ces Français ? ils n'ont qu'à s'occuper du traitement inhumain de leurs migrants en Europe, diront-ils.  

Et pourtant les faits sont têtus : depuis début Juillet, des centaines de subsahariens sont déportés dans le désert entre la Tunisie et la Libye, sous une chaleur de près de 50°C puis ils sont abandonnés à leur sort. Officiellement une mère et sa fille sont mortes de soif (la désormais célèbre photo de "Fati Dosso et sa fille Marie" l'atteste). D'après des témoins sur place (ONG, journalistes étrangers et gardes frontières libyens), ils seraient encore plus nombreux à avoir perdu la vie dans cet enfer. Mais non ! vous diront nos tunisiens patriotes, ils s'agit d'un mensonge, voire d'un complot islamo-qataro-libyen visant à déstabiliser le pays. 

Ce déni de réalité ne présume pas d'un racisme larvé ou d'une quelconque justification de cette politique de déportation. Car les racistes tunisiens ne cachent pas du tout leur joie. Ils sont légion depuis que Saïed a ouvert le bal le 21 Février 2023 suite à son discours xénophobe qui avait déchainé les foules contre les subsahariens notamment à Sfax. 

Le déni de réalité dont je parle concerne une autre catégorie de tunisiens qui refusent d'accepter cette tâche indélébile qui va désormais leur coller au front. Un peu comme une famille toute propre sur elle qui découvre en son sein une terrible histoire d'inceste. Pour ces Tunisiens bourguibistes, progressistes et qui ont soutenu le coup d'Etat de Saied contre les islamistes, il est plus commode de croire au complot contre la Tunisie que d'accepter les faits, à savoir : l'Etat tunisien administre la déportation de subsahariens vers la désert.

Ce déni est très problématique en soi. Il est le signe d'une société hypocrite qui préfère protéger ses monstres intérieurs plutôt que de les affronter. Artistes, activistes, journalistes, sportifs, influenceurs auraient dû être les fers de lance d'une prise de conscience générale qui transcende les clivages politiques, sociaux, et qui crie STOP à la déportation ! Et pourtant c'est le silence…

A quoi sert notre solidarité pour la Palestine ?

Par cette question, je ne veux surtout pas mettre en compétition les drames humains. Il est normal que certains se soient "spécialisés" dans certaines dénonciations et qu'ils aient à cet effet développé une rhétorique très sophistiquée pour désigner le mal et les degrés de compromissions avec l'oppresseur. La cause palestinienne est à ce titre une vraie école d'apprentissage, qui pourrait pourtant servir de manuel de lutte pour toute atteinte aux droits humains (si tant est que le droit des peuples à l'autodétermination passe d'abord par la défense des droits humains élémentaires). 

Notons à cette occasion l'admirable travail de la campagne BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions) qui vise à boycotter Israël pas seulement en ciblant les israéliens eux-mêmes, mais aussi les individus ou les entreprises qui "normalisent" avec l'Etat sioniste. L'efficacité de BDS est telle qu'elle s'est imposée au cours des dernières années comme une sorte d'autorité morale capable d'anéantir le prestige d'un artiste ou d'un universitaire pour une suspicion de normalisation avec l'ennemi. Certains artistes tunisiens que je connais, avant leur participation à un événement sentant le souffre israélien, "négocient" directement avec BDS pour prévenir d'éventuelles représailles de la part du mouvement.

C'était peut être le grand tort de la chanteuse tunisienne Emel Mathlouthi de n'avoir pas demandé à BDS un "visa" pour ses concerts en territoires occupés notamment celui prévu à Haïfa, ville à majorité arabe sous gouvernance israélienne. Une succursale tunisienne du mouvement a directement accusé Emel Mathlouthi de normaliser avec l'ennemi obligeant celle-ci à annuler son concert à Haïfa afin d'éviter le scandale. Mais c'était trop tard, le mal était fait, à tel point que le festival d'Hammamet (Etat tunisien) a déprogrammé la prestation de la chanteuse prévue en août. 

Même si je partage en théorie l'avis de BDS, je trouve terrible que cette histoire de boycott coïncide avec l'affaire de déportation de subsahariens, où certains artistes étrangers en sont à boycotter la Tunisie pour "normalisation avec le racisme" (voir ici). Comment nous Tunisiens, pouvons être sincères dans notre lutte pour les droits des Palestiniens, si nous restons muets face un scandale humanitaire qui a lieu dans notre pays ? 

BDS

Emel Mathlouthi aurait dû saisir la censure dont elle a fait l'objet, pour renvoyer la marchandise à l'expéditeur et annoncer que c'est elle qui boycotte le festival de Hammamet pour condamner la normalisation avec Kais Saied et sa politique raciste de déportation de subsahariens. Il est malheureux de constater qu'aucun artiste tunisien jouissant d'une grande notoriété n'ait pris de position claire à ce sujet. Je n'évoquerai plus le cas de la championne de Tennis Ons Jabeur pour ne pas me faire incendier une troisième fois par ses fans. 

Heureusement qu'existe la Palestine pour se donner bonne conscience et montrer son engagement politique. Un engagement politique peu coûteux, qui semble plus s'insrire dans une démarche marketing que citoyenne.    

BDSM

Pour revenir à notre illuminé de Carthage, celui qui nous a fait passer du côté obscure, il vient de limoger sa première ministre, l'innocente et douce Blanche Neige la Bouden. Après lui avoir fait remonter les bretelles dans une vidéo "Fessbook", il annonce quelques jours plus tard, toujours sur "Fessbook", le renvoi de sa première ministre. 

Le nouvel élu est un inconnu. Au diable ses diplômes, ses compétences, ses expériences... le seul critère qui compte pour le poste de premier ministre c'est le degré de masochisme de celui ou celle qui devra supporter les coups de fouets permanents du Sado de Carthage...

BDSM

Quelques jours plus tard, c'est au tour de la patronne de la télévision nationale, la dénommée Awatef Daly, de se faire humilier en public par Zabaïed, toujours sur le "fessbook présidentiel", seul et unique organe de communication de la présidence. Une émission sur le "bon vieux temps", en guise de célébration du 120ième anniversaire de Bourguiba, aurait déplu a Saïed, la jugeant trop favorable à Bourguiba, qui, selon la lecture du sado de Carthage, serait le responsable de nos malheurs.

Loin de moi l'idée de nier l'héritage du père de la Nation, mais je pense comme Saïed que nos malheurs sont bien le fait de Bourguiba dont le seul héritage très solide qu'il a su laisser derrière lui, c'est ce foutu syndrome du prophète qui touche ceux qui s'assoient sur son trône de Carthage !

BOURGUIBA

Alors ne nous étonnons pas de voir autant de caca dans le pays quand le destin offre à l'idiot du village la chance historique de poser ses fesses sur ce trône maudit...

SAIED

Commentaires
F
je suis étonné de lire sous la plume de Z deux inexactitudes ( mais il se peut que s'agissant d' Israël certaines libertés avec l'histoire et la géographie soient autorisées et même recommandées ) ;en effet la ville de Haïfa ne se situe pas en "territoire occupé" mais dans les limites des frontières de l'état d'Israël telles qu'elles sont internationalement reconnues ; son appartenance à l'état d'Israël n'est pas contestée sauf si on se rallie au narratif du Hamas. selon lequel toute la Palestine historique est un "territoire occupé ";d'autre part Haïfa n'est pas une ville à majorité arabe sous administration israélienne mais une ville avec une large majorité juive et une importante minorité arabe (musulmane et chrétienne)ainsi que d'autres minorités comme les BahaIs minorité persécutée dans le monde musulman ; Haïfa est une ville connue en Israël pour l'excellente qualité des rapports existants entre ses différentes communautés , juive , arabe et autres
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