De la religion coulée dans le béton constitutionnel...
Nos branleurs du Bardo, élus du peuple, incarnant la volonté de quelques tunisiens conservateurs, viennent de nous pondre le préambule de la future constitution. Le texte à peine sorti du four qu'il pue déjà l'obssession identitaire. Il dégage une âpre odeur d'islamité renforcée d'arabité, le tout saupoudré d'humanisme pour faire taire les quelques rescapés progressistes.
Entre les idéaux de la révolution (Liberté, Dignité, Justice) et ces rajouts identitaires, surgit un goût amer de trahison. Mes amis, le chantier du travestissement idéologique de la révolution commence sous nos yeux. Ce préambule sonne l'ouverture des travaux!
(Lire ici le préambule)
Anodin à la première lecture, ce texte cache néanmoins des vices de fabrication susceptibles de fragiliser toute l'infrastructure de l'édifice national. Se déclarant d'entrée de jeu "basé sur les constances de l'islam et de ses objectifs" (traduit de l'arabe), il reconnaît explicitement son recours à un corpus irrationnel dans l'établissement de notre projet collectif de vivre ensemble. Si déjà dans l'article n°1 de l'ancienne constitution est mentionné l'islam comme religion de l'Etat, formulation assez floue qui ne précise pas le rapport entre les deux, aujourd'hui avec ce préambule nous savons que la constitution tiendra ses bases de l'islam. Que celui-ci constituera ses piliers, sa structure, son béton armé. Détail de taille mes amis!
Bien sûr, l'on me rétorquera que l'islam porte en lui les valeurs universelles, mais dans ce cas précis pourquoi prendre ce détour religieux semé de confusions, d'approximations, mais surtout discriminatoire envers les minorités qui n'adhèrent pas au dogme? Pourquoi ne pas prendre le raccourci de "l'Universel", certes concept d'origine occidental, mais non moins universel par sa logique et sa rationalité? Ah! j'ai oublié, il s'agirait d'un emprunt à ces chiens d'occidentaux qui nous ont colonisé, qui martyrisent nos frères en Palestine, mais qu'on aime seulement lorsqu'il s'agit de consommer leur technologie, leurs bagnoles, leur facebook ou leurs Nike, puma et Reebok.
Puis surtout à quoi bon sert d'intégrer dans notre réalité déjà assez complexe comme ça, un surplus de complexité métaphysique de bédouins arabes d'il y a 14 siècles?
Vers le Zaballahisme constitutionnel
Il est évident qu'en donnant à notre consitution un socle religieux, nous intégrons une part d'irrationnel dans nos textes de lois, ouvrant ainsi la porte aux multiples interprétations. Nous mettrons sous tutelle notre citoyenneté au profit d'experts de la religion qui nous expliqueront d'après leurs sciences occultes les arcanes de nos codes de conduite et de nos lois. Ils useront de sourates ou de hadiths hermétiques -à nous autres pauvres mortels- pour légiférer à notre place, censurer et attenter à notre liberté. C'est ce qui vient d'ailleurs de se produire aujourd'hui dans la galerie El Abdelia à La Marsa, où des zaballahistes (accompagnés de huissiers notaires et avocats) ont menacé des artistes les obligeant à décrocher leurs oeuvres, et ce -certainement- au nom de valeurs "basées sur les constances de l'islam et de ses objectifs"! (voir ici)
N'importe quel zaballahiste est respectable et a droit au chapitre plus que nous, car sa connaissance "en constances d'Islam et de ses objectifs" est de loin supérieure à la nôtre. Voulez-vous encore un dessin?