Quand Ammar 404 frappe le New York Times
Une nouvelle histoire de caricature secoue en ce moment la presse américaine. Le dessin ci-dessous du portugais Antonio Moreira Antunes publié le 27 Avril dans le New York Times a provoqué une telle polémique que le journal a décidé le 10 Juin, de ne plus du tout publier de dessins politiques dans son édition internationale (voir ici).
Considéré comme antisémite, le dessin a suscité un tollé non seulement au sein de la communauté juive mais au delà. On peut constater effectivement que la caricature évoque cette idée sous-jacente du juif qui domine le monde, cliché qui au 19ième et vingtième siècle, rappelons-le, avait conduit aux pogroms, aux génocides et tout ce que l'Europe fasciste a pu produire d'horrible et d'affreux. Les caricatures antisémites de l'époque étaient non seulement le reflet d'une grande partie de l'opinion européenne, mais pire encore, du Pouvoir lui-même. Ces dessins combinaient des poncifs récurrents tels que l'étoile de David, le rabbin, ou encore des personnages diaboliques aux nez crochus pour désigner les juifs.
Mais alors, devrons-nous dans le contexte mondial actuel continuer à crier au loup à chaque dessin à charge affichant une étoile de David ou un rabbin ? Est ce que ces mêmes symboles gardent encore aujourd'hui les mêmes significations dans un monde où un État qui se dit juif, pratique une politique d'apatheide et de colonisation avec le soutien inconditionnel de la première puissance mondiale ?
Pas si sûr ...
Le dessin en question a été publié à la suite de la déclaration de la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan. Cette décision unilatérale, à été prise par Trump fin Mars et ce au mépris de la Syrie en guerre puis surtout contre le consensus international. En pleine campagne électorale israélienne, cette annonce semblait dictée par Netanyahu qui d'ailleurs remportera les élections et récompensera son maître (allusion au dessin) en donnant le nom de "Trump" à l'une de ses colonies sur le plateau du Golan. C'était à l'occasion des fêtes de la Pâque Juive que le premier ministre israélien a annoncé le 23 Avril dernier, cette "heureuse" nouvelle (voir ici).
La question de savoir si Trump était guidé en aveugle par Netanyahu se posait déjà à l'époque du transfert de l'ambassade américaine à Jérusalem (voir ici), et ce toujours dans le mépris des palestiniens et de la communauté internationale. De manière plus générale, cet aveugle soutien de la droite évangéliste américaine pour l'État hébreux s'inscrit dans une longue tradition biblique qui voudrait que Jésus revienne sur terre si seulement Israël est reconnue comme État juif.
Alors oui ! il y a une dimension religieuse évidente n'en déplaise à mon ami caricaturiste Kichka qui considère que ces symboles seraient inutiles à la compréhension du dessin (voir ici). Si le dessinateur s'interdit d'en faire allusion en se justifiant des grilles de lecture des années 30, c'est qu'il cède sans le savoir à une pression qui montre bien que le Pouvoir est du côté, des intérêts israéliens, des évangélistes américains ou du lobby sioniste. Le vrai Pouvoir se localise d'ailleurs toujours derrière les censeurs (j'en sais quelque chose, coucou Ammar...)
Puis franchement, ressortir les vieux poncifs des années 30 pour salir un dessinateur de presse contemporain, user du sempiternel chantage à l'antisémisme au point de pousser un journal comme le New York Times à ne plus publier de la caricature, c'est une honte et un signal très dangereux. C'est aussi le meilleur cadeau qu'on puisse offrir aux frères Kouachi, aux allahistes et aux wahha(grosse)bites qui se frottent les mains en ce moment même.
Deux poids deux mesures ?
Les lobbystes des pétrodollars seront bientôt en mesure, comme leurs potes sionistes, de considérer le dessin ci-dessous aussi islamophobe que n'est antisémite le dessin ci-dessus...Dessin (le mien) qui d'ailleurs colle parfaitement à l'actualité saoudienne dont la dimension religieuse est intrinsèquement liée à toutes les aventures militaires conduites au Yémen et ailleurs, profitant encore une fois d'un soutien aveugle et inconditionnel de ses alliés américains...
Le caricaturiste Antonio est membre de Cartooning for Peace, réseau de dessinateurs internationaux (dont je fais partie aussi). Plantu grand manitou de la secte des cartoonistes s'est déclaré inquiet de cette censure généralisée qui menace sérieusement notre business (voir ici).