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DEBATunisie
12 février 2024

Deux ans de prison pour un tag

Un jeune “artiviste” de Monastir du nom de Rached Tamboura a écopé de 2 ans de prison (voir icipour avoir tagué sur un mur le portrait de Zabaïed avec la mention “raciste, vassal, cupide, fasciste” (en anglais). Ce tag fait suite au discours raciste prononcé par le président le 21 février 2023 à l’encontre des subsahariens (voir ici).

 

 Si le régime a déjà montré à plusieurs reprises son mépris pour la liberté d’expression (garde à vue de journalistes, artistes…) la sévérité de la peine prononcée contre Tamboura marque l’affirmation d’une politique assumée visant à museler toute critique contre le régime.

 

TAMBOURA_blog

 

Le même Saïed avant qu’il ne s’installe au palais, disait pourtant, que la véritable Constitution est écrite sur les murs par les jeunes révolutionnaires. On connaît la suite. C’est lui qui a écrit entre 4 murs SA constitution, jetant les jeunes en prison. 

Chaque jour le champ des libertés se rétrécit en Tunisie et chaque jour la dictature gonfle proportionnellement au volume du ventre de Saïed. Certes, le président capitalise encore sur les passions tristes d’une partie de la population mais sa popularité s’érode comme en témoignent les dernières élections locales au ridicule taux de participation de 12% (voir ici).

Le durcissement du régime (avec le gonflement de ventre qui va avec) peut être considéré comme un indicateur de la baisse de popularité du locataire de Carthage. Mais il y a aussi un autre indicateur qui est encore plus préoccupant…

 

La fuite en avant 

 

Zabaïed refuse le réel, et se complait dans un narratif où il n’est jamais responsable du fiasco de sa politique. C’est toujours les comploteurs, les traîtres et les étrangers qui demeurent coupables des malheurs de Dame Tunisie. L’indicateur inquiétant dont je parle, c’est la médiocrité croissante de son personnel politique ; notre président est désormais entouré de clowns, de larbins et d’idiots qui le confortent dans sa vision délirante d’une Tunisie riche et puissante victime de conspirations. En témoigne sa dernière visite surréaliste à la Kasba où il fut accueilli par son premier ministre le clown : Ahmed Hachani (voir la vidéo de la présidence ici)

 

DOUBLE_CHLEKA_blog

 

Je sais combien la chose publique ne vous intéresse plus chers amis, et je vous comprends. Mais je vous invite à observer de près l’entrevue de la Sainte Chléka et sa sous chléka Hachani. Je mesure moi-même le degré de mépris qu’inspirent ces mots que j’emploie. Mais rendez-vous compte que ces personnes qui président à la destinée de 12 millions de tunisiens ont pris en otage la chose publique, ont exclu toutes les forces vives du pays et ont jeté en prison les voix discordantes*.

 

Brabi, comment peut-on rester poli avec ces gens ? 

 

Cette visite qui a donc eu lieu le 5 février met en scène une discussion entre les deux plus hauts responsables de l’Etat (Sainte chléka et sous-chléka) qui se lamentent des dysfonctionnements des services de l’Etat (dont ils sont les patrons). Je corrige, ce n’est pas vraiment une discussion, c’est d’abord un monologue de Saied et des verbiages d’un Hachani qui tente désespérément d’en placer une. Saïed, royalement installé sur un somptueux fauteuil, avec son ventre en avant (toujours plus gros) et ses mimiques de dictateur haineux, utilise Hachani comme un miroir dans lequel l’autocrate se parle à lui-même. 

Après cette pitoyable entrevue, Saïed fait la visite des bureaux suivi de son clown. Il ne rate aucune occasion pour faire la leçon à un fonctionnaire terrorisé par la visite de la sainte Chléka. Aucune volonté d’écouter ou de montrer un sincère intérêt pour ses interlocuteurs, Saïed s’écoute parler, étale ad nauseam ses connaissances en Droit (il tient à rappeler qu’il était prof de Droit).

 

Conclusion

 

Cette mise en scène comme celles qui la précèdent, n’a jamais eu pour objectif de renseigner le citoyen tunisien sur la politique que le président et son gouvernement comptent mener contre l'incurie des services publics, contre les pénuries, ou contre la baisse générale du niveau de vie, rien, walou, nada ! Cette comédie ne vise qu’une seule chose : mettre en scène la verticalité du Pouvoir et rappeler au peuple que Kaïs Saïed est l’homme providentiel, et puis merde circulez, y’a rien à voir… 

Sinon je vous invite à découvrir mon entretien avec la journaliste Nawel Bizid dans Deep confessions Podcasts, entretien dans lequel j’ai évité de faire mon Saied…

 

___________________
* Il est à rappeler que cela fait presqu'un an qu'un groupe d'opposants est détenu en prison sans procès dans l'affaire dite du "complot contre la sûreté de l'Etat".  Parmi ces prisionniers politiques, Issam Chebbi, Jawhar Ben Mbarek, Ghazi Chaouachi, Khayam Turki, Abdelhamid Jlassi et Ridha Belhadj, entament aujourd'hui, lundi 12 Février 2024, une grève de la faim ouverte. (voir ici)


Ils sont considérés pas seulement comme des prisonniers politiques mais comme des "otages" du régime de Zabaïed. Ils le sont en vertu du chantage dont leur “hypothétique” libération fait l’objet. Ce chantage exercé par Kais Saïed est destiné à l’ensemble de la classe politique tunisienne. Il leur renvoi un signal clair : Ôtez vous TOUS de mon chemin sinon vous savez ce qui vous attend.

 

Il s’agit d’un cas flagrant de complot orchestré par le président lui-même. Un complot assumé et transparent visant à éliminer toute opposition qu’il accuse par ailleurs de comploter contre lui. Car dans la cabosse ventousée de Saïed la politique ne s’explique et ne s'exerce que sous le prisme caricatural du complot. Lui se targue de comploter en plein jour quand ses rivaux conspirent la nuit. Voilà le seul argument par lequel l’idiot de Carthage se croit légitime de détenir les pleins pouvoirs : lui le jour, eux la nuit.

 

Un enfant de 4 ans ferait mieux.
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